Les mécanismes de déclenchement des arythmies cardiaques
Karine Petit, Infirmière, CHRU Tours
Mars 2023,
Introduction :
Parler des mécanismes de déclenchement des arythmies cardiaques nécessite de comprendre le processus physiopathologique de celles -ci. Nous verrons ensuite pour chaque arythmie le mécanisme de déclenchement.
Le triangle de Coumel
Les acteurs impliqués dans les arythmies cardiaques ont été schématisés par Philippe COUMEL sous forme d’un triangle:
- Le substrat (anatomique et électrophysiologique) participe au trouble du rythme du fait d’une zone de nécrose ou de fibrose ou certaines altérations des propriétés électrophysiologiques à l’origine d’une zone à conduction lente, induisant une réentrée.
- La gâchette peut être une extrasystole, une accélération de la fréquence cardiaque
- Les modulateurs sont : "neuro-humoraux (en particulier une stimulation sympathique, ou parasympathiquue), électrolytiques (hypokaliémie, hypomagnésemie) ou métaboliques (ischémie, acidose). Une perturbation de ces facteurs augmente la sensibilité du substrat et/ou module la conduction au sein du circuit. " 1
Rôle du potentiel d’action
De part et d’autre de la membrane des cellules vivantes, il existe une différence de potentiel appelée potentiel de membrane. Dans les cellules excitables (musculaires, nerveuses, cardiaques), cette différence peut varier, et on parle de potentiel de repos en dehors de toute stimulation et de potentiel d’action en cas de stimulation supraliminaire.
Le potentiel d'action est un changement rapide du potentiel de la membrane cellulaire en réponse à la stimulation, puis conduit à la transmission d'une impulsion électrique qui se propagera de porte en porte dans le tissu environnant.
La durée du potentiel d'action est sous la dépendance de courants ioniques. Toutes modifications de ces courants s'accompagnent d'un raccourcisement ou allongement du potentiel d'action source d'extrasystole (gachette) ou de modification de la vitesse de propagation de l'activité électrique dans le myocarde.
Les différents mécanismes de déclenchement en rapport avec les tachycardies correspondantes les plus courantes
A l’étage auriculaire :
La fibrillation auriculaire
La fibrillation atriale (FA) est une arythmie supraventriculaire caractérisée par une dépolarisation anarchique du myocarde atrial.
Elle se présente sous trois formes:
- paroxystique: accès spontanément résolutif, d’une durée inférieure à 7 jours.
- persistante: absence d’arrêt spontané ou > 7jours
- permanente: FA persistante de plus d’un an.
Mécanisme:
Deux conditions sont nécessaires à la genèse de la FA2:
- Le ou les foyers initiateurs ectopiques (triggers) situés dans l’immense majorité des cas dans les manchons de muscle strié pénétrant de l’oreillette gauche vers les quatre veines pulmonaires .
- Les circuits de micro réentrées ou «vaguelettes» facilités par un remodelage structurel des oreillettes aboutissant à une dispersion des périodes réfractaires, à une diminution de la vitesse de conduction et à une propagation hétérogène des fronts d’activation.
Le flutter atrial
Il s’agit d’un circuit de macro réentrée le plus souvent dans l’oreillette droite.
Le flutter atrial dit commun dépend de l’isthme cavo- tricuspide (zone de conduction lente) situé dans la partie basse de l’oreillette droite limité en avant par la valve tricuspide et en arrière par la veine cave inférieure. C’est un circuit qui tourne en faisant une rotation horaire ou anti horaire dans l’oreillette droite.
Le flutter gauche
Il correspond à une tachycardie auriculaire par macroréentrée , autour d’un obstacle naturel comme l’anneau mitral ou autour d’un obstacle cicatriciel ou fonctionnel de la paroi atriale gauche.
Jonction AV:
La tachycardie jonctionnelle ou maladie de bouveret par réentrée intra nodale (rin)
Le mécanisme de déclenchement se fait à la jonction des oreillettes et des ventricules.
Au lieu d’une seule voie de passage des oreillettes vers les ventricules dans le nœud auriculoventriculaire il existe deux voies distinctes dont les propriétés électrophysiologiques sont différentes une voie à conduction lente et une voie à conduction rapide.
Il suffit qu’une extrasystole isolée s’immisce dans l’une des voies pour descendre dans celle-ci et remonter par l’autre voie. Le circuit se répète entraînant ainsi une tachycardie jonctionnelle.
La tachycardie jonctionnelle par un faisceau accessoire atrio ventriculaire communément appelé faisceau de Kent ou syndrome de wolff parkinson white
Le faisceau de Kent est un tissu embryonnaire qui ne disparaît pas à la naissance qui se situe à l’insertion des valves tricuspide et mitral autour du NAV. L’influx électrique peut gagner les ventricules en empruntant soit les voies de conduction normales (His) soit le faisceau de Kent. Une simple extrasystole atriale peut déclencher la tachycardie en empruntant le faisceau de His dans le sens antérograde puis remonter vers les oreillettes via le faisceau de Kent.
La vitesse de conduction dans le faisceau de Kent n'est pas décrémentielle. En cas d'arythmie atriale (fibrillation atriale, flutter ou tachycardie atriale) la réponse ventriculaire peut être très rapide avec un risque de dégénérescence en fibrillation ventriculaire.
À l’étage ventriculaire:
La tachycardie ventriculaire
Le mécanisme de déclenchement d’une tachycardie ventriculaire est lié aux profils des patients, la plupart d’entre eux ont une pathologie cardiaque évoluée soit un antécédent d’infarctus du myocarde ou une cardiomyopathie (CMD,DAVD).
D’autres facteurs peuvent être impliqués dans la genèse d'une tachycardie ventriculaire:
- troubles hydro-électrolytiques(hypokaliémie ou hypomagnesie)
- une acidose
- une hypoxémie
- effets indésirables de médicaments
- syndrome du QT long
La fibrillation ventriculaire
Dans la fibrillation ventriculaire, l'activité électrique des cardiomyocytes est rapide et anarchique ( les ventricules vibrent) et ne se contractent pas de façon coordonnée.
Les circuits de réentrée sont multiples au sein des ventricules responsables d’une activité désynchronisée des myocytes. La contraction ventriculaire est inefficace
responsable d’un arrêt cardiaque. Seul un choc électrique peut rétablir le rythme sinusal.
Cela se produit généralement chez les personnes qui présentent un myocarde pathologique cicatriciel suite à un infarctus par exemple.
Autres causes possibles :
Les Maladies électriques primaires telles que le syndrome du QT long ou le syndrome de Brugada peuvent être responsables de fibrillation ventriculaire.
Références :
1. https://www.e-cardiogram.com/triangle-de-coumel/
2. www.revmed.ch/revue-medicale-suisse/2006/revue-medicale-suisse-69/arythmies-auriculaires-mecanisme-presentation-ecg-et-traitement-curatif#B1
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